Capital de startup: quels leviers dans le pacte d’associés fondateurs ?
La répartition du capital social est un un passage obligé au démarrage d’une startup. En effet, la question se pose chaque fois que la startup compte plusieurs associés, ce qui est la majorité des cas.
Cette décision est importante alors même que les débuts d’une startup génèrent une montagne de questions et de décisions à prendre. Trop souvent, et particulièrement lors de leur première entreprise, les fondateurs négligent l’importance de prendre le temps nécessaire à la répartition du capital entre eux.
Il en résulte ce qui est souvent l’une des plus mauvaises bases de départ pour une startup lorsqu’elle est faite par défaut : une attribution égale et immédiate du capital entre les fondateurs. Cette méthode peut fonctionner, néanmoins après réflexion elle n’est pas toujours la plus adaptée au succès d’une startup.
Les contraintes de la répartition du capital en startup
Répartir le capital social initial d’une startup n’est pas chose aisée. Entre la nécessité d’aller vite au démarrage pour se concentrer sur l’exécution, et la volonté de maintenir de bonnes relations entre associés en évitant les sujets qui fâchent, la décision prise n’est parfois pas la plus mûrement réfléchie.
Les fondateurs peuvent le plus souvent être tentés d’attribuer immédiatement l’ensemble des actions à chacun des associés, selon une répartition égalitaire ou inégalitaire.
- Une répartition égalitaire sera notamment envisagée pour favoriser la cohésion dans l’équipe et lorsque l’apport de chacun dans le projet est jugé équivalent, elle empêchera parfois la prise de décision faute de dégager une majorité ;
- Une répartition inégalitaire du capital, quant à elle, prendra en compte les contributions plus ou moins importantes des divers associés et sera choisie pour permettre de pouvoir trancher et prendre une décision en toute circonstance.
Une difficulté peut néanmoins rapidement apparaître. En effet, les associés peuvent, individuellement ou même collectivement changer d’opinion, d’orientation, de motivation et se désintéresser progressivement du projet. Au lancement du projet, l’engagement est au plus haut et est partagé par tous, mais avec le temps, certains associés peuvent décider d’arrêter l’aventure pour faire autre chose.
Il est donc important de prévoir cette éventualité et d’y pallier en alignant les divers intérêts en présence et en permettant une sortie rapide et efficace des fondateurs voulant quitter le projet afin de favoriser la pérennité du développement de la startup avant tout.
Le vesting : un instrument à favoriser pour la répartition entre fondateurs
Le vesting ou vesting period désigne une période d’attribution progressive des actions de la société. Autrement dit, plutôt que d’acquérir immédiatement l’intégralité de ses actions, le fondateur en bénéficiera progressivement, à un rythme régulier et déterminé à l’avance. Ce procédé permet de corréler directement l’engagement et la durée passée dans la startup avec le niveau de participation au capital.
Par exemple, prenons une startup avec un capital social de 1000 euros composé de 1000 actions de valeur nominale de 1 euro. Les fondateurs pourront prévoir une répartition du capital à 60%/40%, l’un ayant droit à 600 actions, contre 400 pour le second. Un vesting sur 4 ans pourra être proposé avec une première tranche débloquée au bout de 1 an (cliff), soit respectivement 150 et 100 actions puis une attribution mensuelle de 2,08% des actions, soit 75% au bout de 3 ans et 100% sur 4 ans.
Cet instrument est encore trop peu utilisé par les fondateurs de start-ups. Il permet pourtant aux fondateurs de se rassurer mutuellement sur leur engagement et de sécuriser le projet en évitant le dead equity c'est -à -dire des associés détenant des actions au sein de la société mais étant totalement désintéressés de son devenir. Cela peut même parfois bloquer son développement puisque lors d’une levée de fonds les investisseurs verront d’un mauvais œil qu’un fondateur qui n’est plus actif dans la startup détienne encore une partie du capital.
En pratique, les actions seront souscrites et attribuées immédiatement aux associés fondateurs. En revanche, ils signeront une promesse de vente d’actions qui les obligera à vendre leurs actions lors de la survenance d’un événement, par exemple en cas de départ de la société. Les fondateurs pourront mettre en place ce mécanisme dans les clauses du pacte d’actionnaires, qui contrairement aux statuts de la société, n’est pas public.
Le BSA : un instruments d’intéressement des associés
À ses débuts, la société déjà constituée peut accueillir de nouveaux associés, notamment opérationnels. Pour attirer et surtout fidéliser les meilleurs profils, ces derniers seront intéressés au capital.
Une startup pourra ainsi émettre des bons de souscriptions d’actions (BSA) permettant au nouvel associé de souscrire pour un prix modique (souvent 1 euro unité) des BSA permettant eux-mêmes de souscrire des actions de la société à un prix déterminé à l’avance (le prix d’exercice) et durant une certaine période (la période d’exercice) qui s’étale généralement sur une durée de 4 ans.
Ces BSA pourront eux aussi faire l’objet d’un vesting afin de s’assurer de l’engagement sur la durée de l’associé. Les BSA lui seront ainsi attribués par tranches. En général, la première tranche de BSA (le “cliff”) est débloquée au bout d’un an et correspond à 25% du total des BSA, le reste pourra être attribué mensuellement ou bien trimestriellement.
L’associé acquerra donc à un rythme régulier, déterminé à l’avance et à un prix incitatif des bons permettant d’acquérir des actions de la startup. Il est donc incité à rester au sein de la startup durant l’intégralité du vesting afin d’acquérir l’ensemble de la participation octroyée au capital.
Il est également incité à augmenter ses résultats puisque si son travail contribue au succès de la startup, il pourra directement en percevoir les fruits en cédant plus tard ses actions et en réalisant une plus-value.
L’encadrement des relations entre fondateurs : le pacte d'associés fondateurs
On ne présente plus le pacte d'associés fondateurs (ou pacte d’actionnaires) tant il est crucial pour organiser les relations entre fondateurs de startup. Rédiger un pacte vous permettra d’assurer la continuité de la startup en organisant par avance vos relations afin d’éviter d’éventuels litiges.
Le pacte d’actionnaire entre associés fondateurs contiendra ainsi des clauses d’implication (aussi appelées clauses de leaver). En la matière, on distingue la clause de good leaver (départ respectant les engagements) et de bad leaver (départ ne respectant pas les engagements).
- La clause de good leaver : le fondateur ou l’associé souhaite quitter la startup mais a respecté ses engagements. Le départ est réalisé après la durée convenue (par exemple 4 ans), ou bien il arrête le projet pour cause de maladie, la totalité de ses actions lui sont attribuées (vestées), il est libre d’en disposer en intégralité et de les céder à leur prix de marché.
- La clause de bad leaver : si le fondateur ne respecte pas ses engagements, par exemple s’il viole une clause de non concurrence ou bien s’il qu’il quitte la startup avant le terme de la durée convenue, le départ est fautif, il s’oblige par avance à céder ses actions via une promesse de vente aux autres fondateurs.
Plusieurs options sont possibles pour encadrer le départ fautif.
- Le cas le plus fréquent est de prévoir une cession des actions au prix de marché, affectée d’une décote en fonction de la gravité du cas de départ, par exemple 30% ;
- Il est également possible de prévoir, quel que soit le cas de départ, uniquement sur une base temporelle que les actions non vestées seront cédées à leur valeur nominale tandis que les actions vestées seront cédées à un prix de marché ;
- Il est également possible, et plus rare, en cas de départ grave, de prévoir la cession de l’intégralité des actions, vestées et non vestées à leur valeur nominale.
Le prix de marché, qui correspond à la valeur réelle de la société, pourra être déterminé sur la base de la dernière augmentation de capital réalisée, en recourant à un expert ou encore par une formule mathématique (multiple d’EBITDA).
Par exemple, une startup au capital de 1000 euros, divisé en 1000 actions de valeur nominale 1 euro. Deux associés X et Y co-fondent la startup, selon une répartition à 60%(X) soit 600 actions /40%(Y) soit 400 actions. Un vesting est prévu sur 4 ans (48 mois), selon un rythme trimestriel.
Au bout d’un an, la startup vaut 100 000 euros. Au bout de 18 mois, Y quitte la startup, il a donc accumulé 6 trimestres sur 16. Il a droit à 6/16e de ses actions soit 37,5%, soit 150 actions, tandis que 62,5%, soit 250 actions sont non vestées. Il pourra revendre 150 de ses actions au prix de 100 euros (15 000 euros) et le solde à la valeur nominale (250 euros).
Les clauses de leaver permettent donc à l’ensemble des associés actifs de se reluer (augmenter leur participation) au prix qui correspond à la valeur réellement apportée à la startup par le fondateur sortant.
Enfin, pensez à digitaliser votre actionnariat afin d’assurer le respect des stipulations de votre pacte par l’automatisation des transferts d’actions au profit des fondateurs actifs.